09 octobre 2020

Romain Champy, Directeur pôle opérationnel 2 « La transformation de la ville sera plus radicale et rapide sous l’effet de l’expérience COVID »

Chez Oppidea, une mission développement-prospective permet de réfléchir à la ville de demain. L’aménageur en exprime déjà sa vision au sein des opérations d’aménagement qu’il mène et dans les propositions formulées sur des appels à projets. Mais face aux enjeux de la ville Post-COVID, l’importance de penser la ville au futur est décuplée. Explications.

Durant le confinement, l’enjeu du logement est apparu crucial. Comment interpréter ce qui s’est passé et en tirer des enseignements ?


Un constat d’abord : la partie de la population qui a le plus « subi » le confinement est celle qui connaît déjà le mal-logement (exigüité, insalubrité, etc.). Si le confinement a souligné une priorité à poursuivre dans les prochaines années, c’est celle de produire du logement social de qualité, adapté à la taille des ménages. La ville inclusive passe d’abord par là.

Lors de cette période de vie forcée chez soi, l’accueil de multiples usages dans son logement s’est posé à beaucoup : comment ménager en même temps vie quotidienne, travail, éducation des enfants, etc. La disposition des pièces de vie, et plus encore leur modularité, anime les architectes. De nouvelles propositions seront faîtes et nous aurons à intégrer cet enjeu.


Avec le confinement, le « rapport à l’extérieur » sur le logement a aussi fortement évolué. Tout le monde ne pourra évidemment pas disposer d’un jardin privatif. En revanche, tout le monde devra, dans les années à venir, pouvoir bénéficier d’un extérieur généreux : terrasse, balcon, loggia, etc.


Dans les cœurs d’îlots aussi, les espaces de sociabilité vont mieux s’organiser pour en tirer un confort de vie de voisinage. Ces espaces intermédiaires doivent être lumineux et généreux, aménagés pour la rencontre (jardins partagés, bancs, jeux, etc.) : les architectes et promoteurs en ont désormais parfaitement conscience, c’est tant mieux !

 

ZAC Saint-Martin-du-Touch - Jardins partagés
ZAC Saint-Martin-du-Touch - Jardins partagés

Les services présents (ou non) dans une proximité immédiate, à l’échelle des quartiers, doivent-ils selon vous évoluer encore ?


On s’est tous rendu compte que disposer d’une supérette, d’une boulangerie, d’un médecin, d’une pharmacie ou d’un coiffeur près de chez soi pouvait avoir un impact réel sur son agrément de vie. Oppidea n’a pas attendu l’épisode du confinement pour placer cette question au cœur de son approche : rendre accessible les commerces et services à l’échelle de chaque quartier est prioritaire. Nous investissons même en direct, afin d’ancrer dans le temps les commerces et services au plus proche des habitants.

Reste qu’il faut demeurer exigeant sur la nature de l’offre commerciale, afin de proposer une diversité la plus large possible. La question des circuits courts a fortement gagné en importance aux yeux des gens, il nous faut la prendre en compte pour la traduire dans notre réalité urbaine demain.

Avec la circulation d’un tel virus, on constate que se déplacer n’est pas anodin. Quelles leçons en tirer à l’échelle d’une métropole comme Toulouse ?


Le rapport aux transports en commun a changé, sans que l’on sache encore si cela aura un impact de long terme. Une partie de la population les évite clairement, et s’est rabattue sur la voiture individuelle. On sait les conséquences immédiates de cette décision : congestion et embouteillages, pollution de l’air mais aussi nuisance acoustique. La place de la voiture en ville est une problématique sur laquelle nous tentons de faire bouger les choses.

Une autre partie de la population opte pour le vélo : il nous faut sur le sujet créer de véritables parcours, incluant les infrastructures de type piste, mais aussi les moyens de garer en sécurité son vélo, proche de chez soi, de son travail, en ville. De ce point de vue, les « corona pistes » créées à Toulouse au moment du déconfinement, sont un levier simple pour accélérer rapidement le maillage.

 

Pistes cyclables - Écoquartier Toulouse Aerospace
Pistes cyclables - Écoquartier Toulouse Aerospace

Le rapport au travail a connu des évolutions majeures en quelques mois. Avec quelles conséquences en matière d’aménagement urbain ?


Tout le monde a pu constater l’aide déterminante jouée par le digital, dans la poursuite d’activité. Mais le déplacement de la sphère professionnelle dans le logement individuel a posé de nouvelles questions, en termes d’aménagement intérieur (cf. plus haut), mais plus largement sur la notion même de télétravail.
L’enjeu doit aussi se comprendre d’un point de vue spatial, à l’échelle d’un territoire urbain. Les télétravailleurs et leurs employeurs pourraient bien voir dans les tiers-lieux une autre solution à adopter. Cela combine en effet plusieurs avantages, notamment éviter les déplacements pendulaires et les nuisances générées, le temps dans les transports subi par les travailleurs. La flexibilité de la solution, avec des jours ou des périodes qui peuvent évoluer facilement suivant les besoins, est aussi vue d’un bon œil.

La nature en ville revient aussi au centre des attentes. Comment répondre à un tel défi ?


La proximité des espaces verts avec les logements n’est pas liée à l’expérience du confinement, mais lui a donné une nouvelle place, c’est certain. Oppidea intègre cet enjeu de la nature dans chacune de ses opérations d’aménagement, avec une réelle ambition.

Les corridors et la végétalisation des villes ont évidemment une fonction de respiration, notamment face aux effets du changement climatique et aux îlots de chaleur urbains. Mais les jardins, parcs ou squares répondent aussi à des usages multiples, que les gens plébiscitent : promenade, détente, sport, rencontres, etc.


Dans les quartiers qu’Oppidea aménage, les espaces publics et paysagers sont déjà réalisés avec l’ambition d’y favoriser la biodiversité et d’en diminuer l’empreinte carbone. Aujourd’hui nous allons plus loin : nous demandons aux partenaires  promoteurs que nous sélectionnons avec la collectivité, de s’engager sur la certification Effinature afin d’étendre les objectifs en faveur de la biodiversité  sur les cœurs d’îlots et les bâtiments.

Retour à la catégorie Groupe